La technologie est un moteur de croissance sans précédent. Le développement rapide des technologies et la mise en œuvre de technologies comme l’intelligence artificielle (IA) dans les produits et les services rendent le rôle critique de la propriété intellectuelle (PI) encore plus évident. D’une manière générale, la propriété intellectuelle est un actif financier précieux et flexible pour les entreprises technologiques, qui sert de point de données important pour l’évaluation des entreprises et les investissements. Pour des résultats optimaux, tous les intervenants, des développeurs de logiciels aux membres de la haute direction, doivent participer activement à la stratégie de propriété intellectuelle.
Les entreprises technologiques canadiennes se préoccupent de plus en plus de leurs droits de PI et de ceux de leurs concurrents. Dans une récente Enquête sur la connaissance et l’utilisation de la propriété intellectuelle (ECUPI), la moitié des entreprises détentrices de PI ont indiqué que cela avait contribué à améliorer leurs résultats, notamment les avantages concurrentiels, la réputation et la confiance, en plus de l’augmentation des revenus. On a constaté qu’environ la moitié des entreprises de technologies de l’information et de technologies propres possédaient au moins un type de PI. Cependant, un nombre important d’entre elles ne tirent pas pleinement parti de leurs actifs de propriété intellectuelle pour établir un avantage concurrentiel et accroître leur rentabilité.
Pour favoriser la récolte de l’innovation, les entreprises technologiques focalisent leur attention sur la manière dont les innovateurs innovent, et leur donnent les moyens de repérer les idées prometteuses pour la protection par brevet ou par secret commercial. Ces efforts, associés à une rationalisation délibérée du processus de protection de la PI avec l’aide coordonnée d’un conseiller juridique en PI, qu’il soit externe ou au sein de l’entreprise, peuvent porter des fruits précieux.
ça vous dit quelque chose ?
« Il faut sortir le produit MAINTENANT ! » Les entreprises technologiques se concentrent, à juste titre, sur la création de produits à distribuer aux clients. S’il est compréhensible que, dans le feu du développement quotidien d’un produit, les mesures visant à obtenir une protection de la PI soient reléguées au second plan, cela peut entraîner la perte de droits de PI importants. Lorsque cela se produit pour plusieurs technologies, la perte de l’avantage lié à la PI peut être amplifiée.
« Je crains que travailler à obtenir un brevet exige trop de temps. » On surestime souvent le temps et l’effort requis. Un agent de brevets compétent peut contribuer au processus de saisie des inventions si l’équipe d’innovation est très sollicitée et ne peut y consacrer qu’un minimum de temps. La documentation existante, comprenant les documents de spécification du produit, le déroulement des processus (organigrammes), les captures d’écran de l’interface graphique et les applications de RS&DE, suffit souvent pour commencer la préparation d’une demande de brevet.
« Que signifie ce brevet du concurrent pour nous ? » Il est important que l’équipe technique soit au fait de la PI. Pour y parvenir, il faut instaurer une culture favorable à la PI et veiller à ce que les discussions entre les innovateurs incluent les implications liées à la PI.
« S’il y a là une idée véritablement révolutionnaire, la direction s’en saisira sûrement. » On peut avoir l’impression que seules les idées exceptionnelles méritent une protection par brevet. En général, les ingénieurs et les développeurs, en particulier ceux qui sont moins expérimentés, ont tendance à croire que leurs idées sont « indignes » d’un brevet et ils minimisent la nouveauté et l’inventivité de leurs idées. Ils peuvent également ne pas savoir comment signaler à la direction la brevetabilité d’une nouvelle idée. Il faut favoriser une culture où chaque innovateur est encouragé à parler de ses idées technologiques.
ENCOURAGER UNE CULTURE FAVORISANT LA PI
La propriété intellectuelle commence par des innovateurs. Les innovateurs en entreprise doivent savoir que l’entreprise priorise l’innovation, qu’elle veut entendre de nouvelles idées pour de nouveaux produits et services. Les entreprises devraient revoir régulièrement leurs canaux internes de capture de l’innovation, leur formation en matière de brevets, leurs incitatifs aux inventeurs et leur programme d’exploitation de l’innovation pour s’assurer de fournir un renforcement positif suffisant pour favoriser une culture favorable à la PI. Ces mesures démontrent à l’organisation entière que la PI est importante et valorisée.
Des champions à l’interne – Pour établir une culture d’entreprise favorable à l’innovation, la clé est de se doter de champions à l’interne, à tous les échelons. Ayez un champion expérimenté appartenant à la direction, qui comprend la valeur de la PI et qui est prêt à transmettre aux autres l’importance de la PI, ainsi qu’à consacrer du temps et des ressources financières aux recherches relatives aux brevets. Il peut être très utile (mais pas essentiel) d’avoir un second champion, qui peut servir de médiateur au quotidien. Les champions à l’interne constituent un canal essentiel entre le conseiller juridique externe et l’équipe technique.
La formation en matière de PI – La meilleure façon de stimuler le développement de la PI par les employés est de leur offrir de la formation sur les concepts de base en PI (p. ex. par l’entremise de déjeuners-causeries) et sur la politique de PI de l’entreprise. Par exemple, il peut être utile de disposer de documents faciles à comprendre sur les cinq types de PI, les cinq étapes du processus de brevetage et la décision à prendre entre garder une invention comme secret commercial et la breveter. Des renseignements plus précis sur le processus de brevetage, de la recherche au dépôt, et des conseils sur la manière d’examiner l’art antérieur et les revendications et descriptions des demandes de brevet peuvent être utiles aux innovateurs qui s’engageront dans le processus de brevetage avec un conseiller en PI externe.
Des recherches productives en matière de brevets — Une manière particulièrement efficace de récolter de la PI dans un environnement qui favorise l’innovation consiste à mettre sur pied des séances régulières de recherche d’inventions. Au fil des ans, j’ai mené de telles recherches auprès de nombreuses entreprises technologiques. Des techniques comme les suivantes peuvent être fort efficaces :
- Les vérifications mensuelles de la PI – Une séance mensuelle pour fournir de la formation et répondre aux questions sur la PI favorise les réflexions et les conversations en continu au sujet de la PI.
- Des séances d’argumentaires régulières – Les équipes de développement qui conçoivent des produits à grand potentiel peuvent offrir aux autres innovateurs et à l’équipe de PI un argumentaire des fonctions prometteuses qu’elles développent. La discussion qui en résultera peut aider les innovateurs à mieux cerner « ce qu’il faut pour que quelque chose soit brevetable ».
L’offre d’incitatifs en matière d’innovation – Les entreprises technologiques les plus innovantes continuent de repenser à comment inciter leurs employés à dépasser la portée ordinaire de leur travail et à trouver des solutions innovatrices aux défis du marché. De nombreuses entreprises technologiques offrent à leurs employés des incitatifs financiers pour générer de la propriété intellectuelle, en leur versant par exemple des primes lorsqu’une nouvelle technologie est repérée et sélectionnée pour faire l’objet d’une demande de brevet ou lorsqu’un brevet est délivré. Certaines études ont toutefois montré que les incitatifs non monétaires qui reconnaissent et célèbrent les innovateurs pour leurs contributions sont plus efficaces. Il peut s’agir de félicitations sur le blogue de l’entreprise, de l’affichage numérique des innovateurs et de leur contribution à la technologie et aux brevets, d’un appel personnel de la direction pour souligner la contribution, ou de la possibilité pour les inventeurs de travailler sur des projets « porteurs de sens ».
Autonomiser les innovateurs à participer au processus de brevetage – Les champions de l’entreprise et les conseillers juridiques externes en matière de PI devraient, ensemble, responsabiliser les innovateurs et les guider à travers les différentes phases de l’obtention d’un brevet. Cela donne à l’innovateur un sentiment de propriété quant au progrès de la technologie et à son succès sur le marché :
- Processus de recherche de l’innovation
- Besoin d’exemples et de données
- Ébauche de la divulgation de l’invention
- Rédaction, dépôt et défense de la demande auprès du ou des bureaux des brevets
Il est également utile d’inclure l’inventeur dans le processus de décision sur l’opportunité de monétiser l’idée.
Une planification et un suivi délibérés – Assurez-vous que votre plan en matière de PI soit repensé annuellement. Le succès d’un plan en matière de PI se mesure en examinant des résultats quantifiables, et on peut ensuite l’améliorer. On peut, par exemple, réviser régulièrement la portée technique et géographique des familles de brevets. De plus, on peut noter les revenus précis associés aux licences octroyées sur les familles de brevets à des tiers. La réussite des inventions brevetées sur le marché devrait être comparée aux sommes investies pour l’obtention de la protection par brevet ; cela vous donnera une perspective utile sur les décisions prises antérieurement en matière de brevets. Enfin, il est possible de tenir un registre des conflits réels et potentiels liés à la propriété intellectuelle des concurrents, ainsi qu’un registre des différends en cours et résolus en matière de propriété intellectuelle.
Une fois que les employés ont une indication claire de l’engagement de leur employeur à l’égard des actifs de PI et une compréhension raisonnable des concepts de base de la PI, ils réalisent que la PI peut constituer une part importante de leur rôle dans l’organisation et deviennent motivés à surveiller et à repérer les nouvelles technologies.
Cet article a d’abord été publié dans la page des articles de la section des technologies de l’information et de la propriété intellectuelle de l’ABO.