Offrir de la rétroaction a toujours été une compétence difficile à maîtriser, et la chose est encore plus complexe maintenant. Il y a pour cela deux raisons reliées : d’abord, l’impact psychologique de la pandémie et, ensuite, le défi de la rétroaction dans un monde virtuel.
la psychologie
Revenons aux notions de psychologie 101 et jetons un œil à la pyramide des besoins de Maslow, ci-dessous. Placeriez-vous la rétroaction vers le sommet de la pyramide ? La plupart des gens le feraient.
En fait, les psychologues nous disent que la rétroaction se situe vers le bas de la pyramide, quelque part entre la sécurité et le sentiment d’appartenance. Nos cerveaux perçoivent la rétroaction comme étant une menace primordiale et quand elle est offerte, ils enclenchent le mode d’autopréservation. Daniel Goleman, auteur de L’intelligence émotionnelle, explique : « Les menaces à notre rang aux yeux des autres sont remarquablement puissantes sur le plan biologique, presque autant que lorsque notre survie est menacée. »
Bien des gens se sentent actuellement en danger physiquement et vivent une réaction exacerbée face à cette menace. Lorsqu’on offre de la rétroaction dans un tel contexte, il ne faut pas s’étonner si ses destinataires passent rapidement en mode survie et réagissent en étant sur la défensive. Fournir de la rétroaction est devenu plus complexe : gardez donc en tête quelques conseils pour vous assurer que vos commentaires sont entendus et qu’on y donne suite.
rétroaction virtuelle
L’élément le plus important de la rétroaction est de se souvenir de la fournir. Cela se produit moins souvent dans un monde virtuel. Les avocats adjoints disent recevoir moins de commentaires depuis qu’ils sont en télétravail. Les conversations impromptues au hasard d’un couloir ont disparu. Et loin des yeux… Cela pose problème, car ne pas obtenir régulièrement de rétroaction mène souvent les avocats adjoints à s’inquiéter à tort quant à la qualité de leur travail et à la sécurité de leur emploi. Et cette inquiétude entraîne à son tour une baisse de l’engagement et de la productivité. Fournir une rétroaction exige plus de réflexion délibérée que par le passé.
Pensez aux trois méthodes de fournir des commentaires virtuels : le courriel, le téléphone et la visioconférence. Dans un billet de blogue, l’avocat et psychologue Larry Richard a expliqué pourquoi la visioconférence vaut mieux :
La vidéo est le média le plus connecté émotionnellement et, en période de crise, il faut favoriser les liens. Si la vidéo n’est pas possible, effectuez vos mises à jour et vos vérifications par téléconférence. N’utilisez le courriel qu’en dernier ressort : le courriel est moins personnel, moins connecté ; il invite les conversations à sens unique et permet moins d’échange.
Il existe, bien sûr, des exceptions. Rien ne sert, par exemple, d’utiliser la vidéo pour commenter un long document si vous avez tous deux ce document devant les yeux. Dans ces circonstances, le téléphone peut mieux convenir.
Si vous utilisez la vidéo, montrez que vous êtes investi à 100 % dans la conversation. Éteignez les notifications et minimisez les autres perturbations dans la mesure du possible. Retournez votre téléphone et gardez votre regard sur votre interlocuteur.
Un petit sondage a révélé que la plupart des avocats adjoints reçoivent principalement des commentaires par courriel. Certains ont remarqué que la rétroaction ainsi livrée était moins détaillée et créait parfois de la confusion. Certains n’aimaient pas se sentir privés de l’occasion de discuter d’enjeux relatifs aux commentaires reçus. Tous ont affirmé recevoir moins de commentaires depuis qu’ils sont en télétravail.
Comme vous ne pouvez pas savoir ce que vit votre collègue à la maison, une bonne pratique consiste à demander l’heure qui lui convient pour converser. Si vous appelez tandis que l’avocat adjoint tente de coucher ses enfants pour une sieste, il ou elle sera distrait, et vos commentaires auront moins de chance d’être bien absorbés.
Comme nous savons que la rétroaction a le potentiel d’activer la réponse à une menace, pensez à évaluer l’état d’esprit et la réceptivité potentielle de votre interlocuteur avant de vous lancer. Vous pouvez le faire en commençant la conversation avec « Comment vas-tu aujourd’hui ? » Si votre collègue passe une journée particulièrement difficile, il vaut peut-être mieux réserver vos commentaires pour un moment plus opportun. À moins bien sûr que la question soit urgente. Il est essentiel de faire preuve d’empathie dans les moments difficiles. La productivité des employés augmente lorsqu’ils travaillent avec des gens qui ont soin les uns des autres. Stephen Covey, qui a écrit Les 7 habitudes de ceux qui réalisent tout ce qu’ils entreprennent, fait remarquer que quand on fait preuve d’empathie, l’énergie défensive se calme et est remplacée par de l’énergie positive.
Une fois que vous avez décidé que le moment est venu de fournir une rétroaction, il est bon de commencer la conversation par une question, comme « Puis-je te donner des conseils ? » Tout le monde répond oui à cela. Dire oui donne un sentiment de contrôle et produit un peu de dopamine, une des substances dans le cerveau qui nous font sentir bien. Vous préparez votre collègue à faire preuve de réceptivité. Il vaut aussi mieux éviter de parler de « rétroaction ». Ce mot évoque l’évaluation et cause du stress. À moins de procéder à une évaluation de rendement, choisissez un autre mot, comme « recommandations », « suggestions » ou « conseils ».
Enfin, assurez-vous qu’un dialogue ait lieu. La rétroaction est beaucoup plus facile à donner et à recevoir dans le cadre d’une conversation plutôt que du haut au bas d’une hiérarchie. Une fois vos conseils livrés, invitez votre collègue à réagir : « Qu’en penses-tu ? », « Cela a-t-il du sens ? », « Crois-tu que tu peux faire cela la prochaine fois ? » Vous pourriez être mis au courant d’obstacles qui rendent votre suggestion impraticable. De plus, l’avocat adjoint risque bien plus de mettre en œuvre une suggestion s’il s’engage à le faire.
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Cet article a d’abord été publié dans la page des articles de la section Gestion de la pratique du droit de l’ABO.