Les perceptions faussées au sujet de l’immigration au Canada sont monnaie courante. Comme avocats qui se consacrent à la défense des droits des nouveaux arrivants, nous devrions nous inquiéter. Nous avons la responsabilité de connaître les faits afin de représenter efficacement nos clients et de promouvoir une plus vaste compréhension de la manière dont notre système d’immigration et son fonctionnement ont été conçus. En tant que champions de la règle de droit et de la justice sociale, nous pouvons jouer un rôle central pour corriger le type de fausses perceptions que je clarifie ci-dessous et pour combattre les préjugés qu’entraînent ces faussetés.

Même s’ils ne travaillent pas directement en immigration, beaucoup d’avocats constatent que l’immigration joue un rôle dans leur pratique juridique. À tout le moins, étant donnée la diversité démographique accrue en Ontario, les immigrants sont nombreux parmi nos clients et nos collègues. La profession juridique, plus particulièrement, admet annuellement un nombre croissant de diplômés formés à l’étranger. À titre d’exemple en ce qui concerne la population en général, Census Canada a relevé que la majorité de la population de Toronto était née hors du Canada, soit plus de 54 pour cent. Bien que le reste de l’Ontario présente moins de diversité en matière de pays d’origine, la tendance veut que la diversité augmente dans toutes les régions. De plus, le secteur juridique participe de plus en plus à des transactions internationales au sein d’une économie mondialisée, et la pertinence de l’immigration dans notre travail et nos vies ne fera qu’augmenter. Enfin, à moins d’être de descendance autochtone, nous sommes tous, au Canada, des immigrants issus de la colonisation.

Au Canada, les nouveaux arrivants peuvent légalement obtenir un statut permanent de trois manières principales. Certains sont des réfugiés, qui obtiennent un statut juridique par l’entremise d’un système qui détermine si leurs circonstances déclenchent le devoir humanitaire de protection des réfugiés imposé aux nations par la Convention de Genève. D’autres sont parrainés par des membres de leur famille, et entrent au Canada dans la catégorie du regroupement familial. La plupart des immigrants entrent cependant au Canada comme travailleurs, par l’entremise d’un système de points qui permet l’entrée de personnes éduquées et hautement qualifiées. La très vaste majorité des immigrants au Canada sont admis dans cette dernière catégorie, celle de l’immigration économique.

Sur Internet se propage beaucoup de désinformation au sujet du système canadien d’immigration. De nombreux sites présentent des faussetés relatives au soutien financier qu’obtiennent les nouveaux immigrants dans notre pays. D’autres publient des renseignements erronés quant au nombre d’immigrants qui entrent au Canada. Il y a aussi beaucoup de fausse information en ligne au sujet du processus de demande d’asile. Certains de ces renseignements inexacts sont fournis par erreur. D’autres proviennent d’ailleurs dans le monde, et les lecteurs comprennent, à tort, qu’ils sont applicables dans leur contexte. D’autres sites, toutefois, induisent intentionnellement en erreur. Une désinformation importante au sujet de l’immigration a, par exemple, beaucoup circulé au moment de l’élection fédérale canadienne de 2019.  

Il est possible que ce genre de désinformation en ligne soit le facteur qui contribue le plus aux perceptions faussées sur l’immigration au Canada. Selon un sondage réalisé par Angus Reid en octobre 2019, la plupart des Canadiens sont très mal informés à ce sujet. Une majorité des personnes interrogées (64 pour cent) a dit que la plupart des immigrants arrivent au Canada de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient. En fait, seulement 12 pour cent des immigrants canadiens proviennent de ces régions. En réalité, la plupart des immigrants canadiens proviennent de l’Asie du Sud et de l’Asie du Sud-Est. Les gens interrogés se sont trompés. Seuls 29 pour cent des répondants ont nommé l’Asie du Sud comme étant l’origine de la plupart des immigrants, tandis que 17 pour cent ont nommé l’Asie du Sud-Est.

Les Canadiens interrogés dans le cadre de ce sondage ont gravement surestimé le pourcentage des immigrants qui sont des réfugiés. Cela pourrait être dû à la vaste couverture médiatique sur la crise internationale des réfugiés. En réalité, au Canada, les réfugiés ne forment que 15 pour cent de tous les immigrants. Pourtant, une majorité des répondants au sondage Angus Reid croyait que 30 pour cent des immigrants étaient des réfugiés. Les personnes interrogées ont aussi grandement sous-estimé le pourcentage des nouveaux arrivants qui appartiennent à la catégorie des immigrants économiques en se qualifiant en vertu d’un système de « points » rigoureux afin de travailler au Canada.

Les malentendus relatifs à l’immigration peuvent être la source de préjugés et peuvent malheureusement motiver les comportements discriminatoires, particulièrement lorsqu’ils poussent les Canadiens à ne pas tenir compte des contributions économiques et culturelles des nouveaux arrivants.

De mon point de vue personnel, dans mon rôle pour promouvoir la diversité et l’inclusion au sein de mon cabinet, je ne saurais trop insister : il est crucial que nous nous éloignions et éloignions les autres des préjugés stéréotypés, des biais inconscients et des comportements intentionnellement discriminatoires. Ces croyances malavisées causent un tort immense aux personnes et ébranlent la société multiculturelle respectueuse canadienne à laquelle nous tenons tant.

En réexaminant nos attitudes tacites, en modifiant notre comportement en conséquence et en diffusant suffisamment les faits au sujet de l’immigration canadienne pour étouffer les faussetés destructrices, nous pouvons faire une différence et favoriser des milieux de travail collaboratifs et des collectivités inclusives et innovatrices.

 

Renseignements sur l’immigration canadienne

L’immigration est un domaine juridique complexe et en évolution constante. Pour des renseignements exacts et à jour sur l’immigration canadienne, consultez des sites gouvernementaux officiels, comme ceux-ci :

Rapports de recherche analytique du gouvernement du Canada :

https://www.canada.ca/fr/immigration-refugies-citoyennete/organisation/rapports-statistiques/recherche.html

Statistique Canada : Immigration et diversité ethnoculturelle

https://www150.statcan.gc.ca/n1/fr/sujets/immigration_et_diversite_ethnoculturelle

Rapport annuel au Parlement sur l’immigration, 2018 :

https://www.canada.ca/fr/immigration-refugies-citoyennete/organisation/publications-guides/rapport-annuel-parlement-immigration-2018/rapport.html

 

À propos de l’auteure

Rebecca Bromwich est gestionnaire de la diversité et de l’inclusion chez Gowling WLG et est membre du Comité de l’égalité de l’ABO.