Voilà presque trois ans que la Cour suprême des États-Unis a rendu sa décision dans Star Athletica, LLC v Varsity Brands, Inc., et al., No. 15-866, dans laquelle elle a réévalué les critères pour qu’une caractéristique intégrée dans la création d’un article utilitaire soit admissible à la protection en vertu du droit d’auteur. La Cour suprême a conclu que les lignes et chevrons des uniformes de claque de Varsity Brands pouvaient être protégés par le droit d’auteur. Toutefois, depuis Star Atheltica, le débat sur la possibilité de protéger les créations de mode par le droit d’auteur a entraîné beaucoup de conversations à travers les territoires. Alors que les designers cherchent une plus grande protection pour leurs œuvres de création, il continue d’exister une dynamique intéressante et complexe entre l’octroi de la protection et la garantie que des éléments et motifs essentiels demeurent dans le domaine public.
La loi aux États-Unis à la lumière de Star Athletica
En vertu de l’article 101 de la Copyright Act of 1976, les caractéristiques de la conception d’un article utilitaire peuvent être admissibles à la protection du droit d’auteur si ces caractéristiques « peuvent être identifiées séparément et sont capables d’exister indépendamment des aspects utilitaires de l’article. » Dans Star Athletica, la Cour suprême a réévalué ce concept doctrinaire de la séparabilité, déterminant que la caractéristique doit pouvoir être perçue comme « une œuvre d’art à deux ou trois dimensions distincte de l’article utilitaire » et se qualifier comme « œuvre picturale, graphique ou sculpturale pouvant être protégée, indépendante ou fixée à un autre médium d’expression tangible, si on l’imaginait séparément de l’article utilitaire auquel elle est intégrée ».
Le droit au Canada
Le droit canadien en matière de droit d’auteur n’impose pas de test de dissociabilité similaire au test américain. Les articles 64 et 64.1 de la Loi sur le droit d’auteur, ensemble, créent plutôt un régime législatif pour la protection par le droit d’auteur des éléments de dessins sur les articles utilitaires. Le paragraphe 64(2) établit que le droit d’auteur ne subsiste dans un dessin appliqué à un objet utilitaire que si l’article est reproduit à moins de cinquante exemplaires. Bien qu’il existe certaines exceptions à cette limite, il a été difficile pour les designers canadiens de revendiquer un droit d’auteur pour leurs dessins de mode.
Si la même trame de faits que dans Star Athletica se produisait en contexte canadien, il est probable, étant donné la règle « moins de cinquante exemplaires » établie au paragraphe 64(2), que les éléments des uniformes de claque n’auraient pas été admissibles à la protection par le droit d’auteur.
La question demeure : comment les protéger ?
Peu après l’arrêt Star Athletica, de nombreux designers et de nombreuses marques ont commencé à demander une meilleure protection de leurs créations de mode, la plupart sans grand succès. Cette question, il ne faut pas s’en surprendre, n’est pas l’apanage des marques internationales : la vulnérabilité à la contrefaçon est un problème qui se présente même dans la mode et dans le monde de l’entrepreneuriat au Canada. Lorsque les multinationales copient et ensuite commercialisent les créations indépendantes, les artistes indépendants trouvent que le combat n’est pas facile à remporter. De plus, la nature de plus en plus numérique du monde dans lequel les entrepreneurs brassent des affaires et diffusent leur travail a créé une couche de complexité additionnelle en ce qui concerne la manière de réagir au « vol » d’œuvres dans le domaine du droit d’auteur.
La protection des dessins de mode par le droit d’auteur continue de causer des débats dans le monde juridique et dans l’univers de la mode. Mais une chose est manifeste : c’est plus qu’une simple tendance.
À propos de l’auteure
Alessia Monastero est présentement stagiaire chez Deeth Williams Wall LLP.
Cet article a d’abord été publié dans la page des articles de la section des technologies de l’information et de la propriété intellectuelle de l’ABO.