On associe facilement les droits de la personne aux avocats en les associant simplement à un domaine juridique, et il est vrai qu’ils en forment un. Les avocats ont le rôle crucial de garantir que l’égalité, la justice et les principes des droits de la personne sont respectés dans l’ensemble de la société. Ceux qui se spécialisent dans ce domaine travaillent jour et nuit au nom de clients qui peuvent avoir subi de douloureuses violations de leurs droits dans le cadre de leur emploi, de leur accès à des services, de leur adhésion collective à des groupes ou associations, de leurs contrats ou de leur logement. Pourtant, au-delà de la lutte pour les droits de la personne, avez-vous déjà réfléchi aux obligations qu’ont les avocats en vertu du Code des droits de la personne?
Comme membres d’une profession réglementée, les avocats sont assujettis aux règles que leur impose le Barreau de l’Ontario. Celles-ci comprennent des obligations en matière d’égalité, de diversité et d’inclusion dans l’exercice du droit. Cet aspect réglementaire mis de côté, toutefois, les avocats sont, d’abord et avant tout, des fournisseurs de services. Dans leurs interactions avec leurs clients, les avocats sont tout aussi tenus de garantir un environnement exempt de discrimination qu’ils le sont dans leur milieu de travail et lorsqu’ils agissent au nom de leurs clients. À cet égard, nos obligations sont les mêmes que celles de nos amis qui peuvent être architectes, ingénieurs, médecins ou travailleurs de service communautaire : en définitive, nous avons le devoir de permettre à une personne qui cherche à obtenir nos services de ne pas subir de discrimination. Cela comprend un devoir d’accommodement pour toute caractéristique du client qui est protégée et énumérée dans le Code des droits de la personne de l’Ontario.
Cette prémisse peut sembler évidente, mais il est important d’examiner à nouveau ces obligations dans le contexte de la transformation considérable qui s’est opérée dans la dernière année au sein de la profession en ce qui concerne notre vision de la diversité et de l’égalité. La plupart d’entre nous sont, par exemple, conscients de nos obligations de professionnalisme et de nos devoirs envers l’administration de la justice. Nous passons un temps considérable à bâtir notre clientèle et une réputation à l’avenant, au sein de la profession comme au-dehors. Mais à quelle fréquence enlevons-nous notre « chapeau professionnel » pour nous regarder comme étant, fondamentalement, des fournisseurs de services ? À quelle fréquence réfléchissons-nous à la manière dont nous servons et, inconsciemment, sélectionnons nos clients ? Ou à la manière dont nous rendons nos services disponibles pour les personnes de différentes ethnies, minorités ou contextes socioculturels ? Avant d’adopter une approche ou de conseiller un client, évaluons-nous nos préjugés ?
Le domaine des agressions sexuelles et de la violence envers les femmes illustre cette question. Dans ma pratique, j’ai vu des dossiers dans lesquels aucune enquête adéquate n’avait été réalisée quant à des allégations de harcèlement sexuel ou d’agression sexuelle, même si l’entreprise avait un avocat à son emploi. Dans l’environnement toxique de certains milieux de travail, des personnes ont peur d’être à nouveau victimisées par les commentaires discriminatoires des avocats qui pourraient les aider au moment du signalement. J’ai aussi vu des cas dans lesquels une victime de violence conjugale issue d’une collectivité racialisée et marginalisée est traitée avec condescendance et réprimandée pour ses choix par les avocats, des avocats qui, même s’ils avaient de bonnes intentions, n’ont pas pris le temps de comprendre la culture ou les pressions sociales qui ont mené la victime à se trouver piégée dans une telle relation. Dans ces deux scénarios, aucun effort n’a été fait pour comprendre et étayer le point de vue du client. En d’autres mots, rien n’a été fait pour accommoder la caractéristique protégée, soit, dans ces scénarios, le sexe et/ou la race.
Au-delà de telles circonstances extrêmes, il est également important de remarquer les façons subtiles dont nos obligations en matière de droits de la personne influencent notre prestation de services. Il est important de réfléchir aux jugements que nous pouvons porter et aux préjugés qui pourraient subtilement influencer nos prises de décisions ou nos stratégies pour les dossiers. Au bout du compte, aucun être humain ne peut s’affranchir des partis pris : la différenciation basée sur la façon dont nous sommes élevés et sur les expériences uniques de nos vies fait partie de la nature humaine. Il est crucial que, en tant que fournisseurs de services, nous reconnaissions nos biais et comprenions ce que nous devons faire pour les corriger. Prenons-nous le temps de comprendre si notre approche dans un dossier, selon nos propres expériences, est la meilleure pour le client, à la fois en ce qui concerne ses droits et en ce qui a trait aux autres aspects de sa vie ? Beaucoup d’entre nous, par exemple, connaissent les obligations, en vertu de la Loi de 2005 sur l’accessibilité pour les personnes handicapées de l’Ontario, de nous assurer que nos milieux de travail sont accessibles et conformes à cette loi. Mais réfléchissons-nous à ce que nous pourrions faire pour servir un client si nous comprenions ses antécédents et sa vie quotidienne ?
Je pose ces questions parce qu’il est temps de nous assurer, tous, que nous nous les posons. L’égalité et la diversité ne sont pas des concepts dont il faut avoir conscience ; il faut plutôt avoir conscience que dans l’Ontario d’aujourd’hui, ces concepts entrent en jeu dans tout ce que nous faisons. Nos milieux de travail, nos clients et nos rôles professionnels sont profondément interreliés avec ces principes axés sur les droits de la personne. En tant que fournisseurs de services, nous devons garder à l’esprit et respecter nos obligations relatives aux droits de la personne en tout temps. Ce n’est qu’en examinant attentivement nos services que nous pourrons nous perfectionner comme avocats.
À propos de l’auteure
Richa Sandill est membre du Comité de l’égalité de l’ABO.