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Conseils de pros pour se préparer à une instance

  • 03 octobre 2017

Nous avons demandé aux membres de l’ABO de nous donner leurs meilleurs conseils pour se préparer à une instance.

Dans la scène finale du film The Usual Suspects, l’agent Kujan sirote son mauvais café de poste de police, perplexe, repensant à son interrogatoire intimidant, mais inutile, du pitoyable Verbal Kint. Puis vient la révélation. En rafale, des images, des faits et des liens s’emparent de son esprit et pointent tous vers ce qui, avec du recul, semble douloureusement évident : l’identité de Keyser Söze. La tasse de café tombe.

Dans ses moments les plus intenses, une plaidoirie efficace aura le même effet pour la personne qui juge des faits. Le rôle du plaideur est essentiellement d’orchestrer l’illusion des épiphanies. 

L’importance de la préparation va de soi. Pourtant, ce qui compte le plus, c’est la manière de donner forme à ces heures innombrables. Avec la maîtrise des faits vient la capacité de tisser un récit. Ce récit doit être simple, cohésif et sembler inévitable selon la preuve. Une fois la trame narrative choisie, il ne faut plus en dévier. Elle doit se déployer avec une patience délibérée, du suspense et en en disant le moins possible. C’est votre rôle de mener les gens à former leurs propres certitudes avec douceur, et non de leur imposer les vôtres. Au bout du compte, la persuasion, ce n’est pas avoir raison, mais convaincre votre auditoire qu’il a raison.

— Sean Robichaud, avocat-procureur


 

Continuez à travailler sur la présentation de la preuve de votre client jusqu’à ce qu’elle soit tissée logiquement dans la doctrine gagnante que vous avez pris soin de sélectionner.

— Chia yi Chua, McCarthy Tétrault


 

Passez du temps à préparer vos témoins, mais ne partagez pas trop votre stratégie avec eux, ou ils pourraient avoir l’air de la défendre à partir du box des témoins.

Préparez une chronologie et un document présentant vos arguments à remettre au juge. Aidez les juges à distiller les faits et donnez-leur une carte du trajet qui mène à la destination où vous souhaitez les mener.

Discutez de la cause avec un collègue pour obtenir ses réflexions. Un autre point de vue ne fait jamais de tort.

— Sahar Cadili, Lawrence, Lawrence Stevenson LLP


 

Maîtrisez les faits

On ne peut pas surestimer le besoin de se préparer. Vous devez maîtriser les faits, connaître les « bons » et les « mauvais » AVANT de commencer.

Maîtrisez les lois sur lesquelles vous vous appuyez

Anticipez les arguments et les obstacles qui peuvent survenir durant l’instance et soyez prêts à y faire face.

Connaissez bien votre récit

Tout cela est crucial pour pouvoir tisser « l’histoire » du point de vue de votre client pour qu’elle se « tienne » factuellement et juridiquement. Plaider, de bien des façons, c’est raconter une histoire, et il faut bien la connaître pour la raconter.

Façonnez bien votre début

L’histoire commence par un début clair, concis, direct : de quoi parle cette cause, et comment allez-vous vous rendre à la ligne d’arrivée ?

Préparez votre interrogatoire principal

Souvenez-vous que l’interrogatoire principal est crucial pour établir votre « histoire ». Vous voulez dépeindre vos clients comme ayant été traités injustement, pour que le juge ait envie de vous aider. La plupart des causes sont gagnées avec des interrogatoires principaux bien réfléchis et bien préparés plutôt que par les contre-interrogatoires.

N’oubliez pas de mettre l’accent sur la réparation souhaitée

Bien des avocats oublient de s’attarder à ce qu’ils veulent que le juge fasse à la fin. Facilitez son chemin vers votre but.

Faites preuve de confiance en salle d’audience

Soyez aux commandes de vos interrogatoires et de votre cause.

— Chris Paliare, Paliare Roland Rosenberg Rothstein LLP


 

Soyez la personne la mieux préparée dans la salle. Ne laissez personne travailler plus que vous ou en savoir plus sur la cause que vous.

— Michael Lacy, Brauti Thorning Zibarras LLP


 

Préparez vos témoins pour des contre-interrogatoires vigoureux. Pour la plupart des témoins, subir un contre-interrogatoire est une situation unique, inhabituelle et potentiellement déplaisante. Vous ne souhaitez pas « trop préparer » un témoin, mais faire quelques exercices de contre-interrogatoire et tester la preuve de vos témoins peut être une bonne façon de donner au témoin une idée de ce à quoi s’attendre en cour, et d’améliorer votre présentation.

Racontez une histoire avec votre interrogatoire principal. Un interrogatoire principal solide est souvent aussi important qu’un bon contre-interrogatoire et de bonnes conclusions finales. Racontez une histoire par l’entremise de votre témoin au lieu de sombrer dans une série de questions ouvertes et monotones (c.-à-d. Ensuite qu’est-il arrivé ? Et ensuite ? Et après ?). Interagissez avec le témoin, faites des liens avec son interrogatoire précédent en ouvrant une question, et faites de votre mieux pour que l’interrogatoire ait l’air d’une conversation, laquelle racontera l’histoire de votre client.

Ne sous-estimez pas la valeur des aides visuelles, des chronologies, des résumés, etc. Les juges sont occupés et, au 21e siècle, même les causes de moindre valeur peuvent être lourdement documentées. Ne sous-estimez jamais à quel point il peut être utile, pour un juge, de recevoir des documents qui simplifient l’affaire et qui lui offrent une vue d’ensemble. Pensez, par exemple, à fournir une chronologie des événements importants, une « galerie de personnages » qui indique les principaux acteurs et leurs liens les uns aux autres, et servez-vous de tableaux et de graphiques, notamment, pour agréger les données.

— Justin Nasseri, Pape Barristers Professional Corporation

 

Assurez-vous de pouvoir expliquer votre cause en une seule phrase qui n’est pas ennuyante à mourir.

— Daniel Goldbloom, Goldbloom Law


 

Comprendre la condition humaine et raconter l’histoire

Un avocat-plaideur efficace comprend que la persuasion exige plus qu’un simple résumé des faits et du droit, ou qu’une explication technique de la position de son client. Il faut que l’avocat raconte une histoire et, pour ce faire, il doit s’humaniser et humaniser son client. Comprendre la condition humaine est essentiel pour une plaidoirie efficace. L’avocat-plaideur n’est pas un ordinateur. Ni le juge, ni le jury, ni tout autre arbitre qui l’écoute – parfois pendant des mois.

Pour capter l’attention, il faut narrer un récit. L’avocat-plaideur qui a du succès ne fait pas que présenter ses arguments : il raconte l’histoire de son client en utilisant des mots faciles à comprendre, qui génèrent empathie et compréhension chez ceux qui l’écoutent. Un élément fondamental d’une narration réussie repose sur la simplification de la communication et le développement de l’histoire, de manière à permettre à l’auditeur d’absorber l’information présentée de façon naturelle et détendue, pour la synthétiser.

Avec les heures de préparation, les entrevues avec les témoins, les ébauches et les réécritures et une grande quantité de café (ou de votre boisson énergisante favorite), on peut facilement oublier que les instances sont là pour raconter une histoire humaine, peu importe les caractéristiques techniques ou les complexités du sujet présenté. Bien des avocats-plaideurs oublient la vue d’ensemble; ils restent pris dans la vase et oublient de narrer un récit. Notre conseil pour préparer l’instance est donc simple : concentrez votre temps et vos efforts sur la construction d’une histoire humaine, qui est facile à comprendre et garde vos auditeurs intéressés et impliqués. Au bout du compte, tout le monde apprécie une bonne histoire, et raconter des histoires, c’est la vocation des avocats-plaideurs.

— Les avocats de Polley Faith LLP 

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