« La marque distinctive du savant, c’est la capacité d’enseigner. »
- Aristotle
La profession juridique s’appuie sur de profondes fondations de mentorat et d’enseignement. Les bons avocats ont de nombreuses aptitudes qui sont aussi requises chez les bons enseignants. En pratique, les avocats enseignent tous les jours : ils éduquent et guident leurs clients, offrent mentorat et modelage aux juristes débutants ou font des présentations pour persuader les magistrats.
Les avocats présentés ci-dessous aiment tant enseigner qu’ils sont passés à l’échelon suivant. Certains enseignent à temps partiel, alors que d’autres ont carrément changé de carrière.
Nous leur avons demandé de nous parler de leur expérience d’enseignement et de nous dire ce qui la rend gratifiante.
J’ai commencé à enseigner parce que j’ai présidé la section de droit administratif de l’ABO il y a plus de dix ans. Lorne Sossin (maintenant doyen d’Osgoode Hall) était alors vice-doyen à la faculté de droit de l’Université de Toronto, et il siégeait à l’exécutif de section. Il a suggéré que j’apporte le point de vue d’un praticien à ce domaine juridique relativement théorique.
J’ai adoré l’intensité associée à être en avant pendant les trois ou quatre heures d’un cours. Enseigner aux étudiants réguliers m’a mené à enseigner à ceux du programme Internationally Trained Lawyers (ITLP). Et enseigner dans l’ITPL, c’est expliquer à la fois le droit administratif et l’histoire politique canadienne à une classe d’arrivants relativement récents.
Ensuite, j’ai fait partie des premiers enseignants du Programme de pratique du droit (PPD) de Ryerson, qui a succédé au programme d’admission au Barreau. Ma plus grande fierté y a été une heure de cours filmée en une seule séquence, sans texte, sur le contrôle judiciaire.
Je continue d’enseigner quand le temps me le permet, y compris en formation continue à Osgoode et comme conférencier. Voir la compréhension éclairer le visage des étudiants me procure une grande joie !
- Andrew Pinto, Pinto Wray James LLP
Durant mes études en maîtrise, je cherchais des moyens de diminuer mes dépenses croissantes en éducation. J’ai posé ma candidature comme assistant à l’enseignement pour un cours sur le droit et la société, et c’est ainsi que j’ai eu l’occasion d’enseigner pour la première fois. J’ai d’abord accepté le poste par nécessité, mais j’ai rapidement réalisé que j’aimais vraiment enseigner, et cela m’a mené vers d’autres occasions de le faire.
Quand je suis devenu avocat, j’ai voulu continuer à enseigner, et j’ai accepté un poste à temps partiel au collège George Brown. J’ai fini par proposer et développer un cours de mon cru, qui traite des aspects juridiques des arts, des médias et du divertissement. J’enseigne et je mets à jour ce cours depuis plusieurs années. Cela m’a mené jusqu’à un poste de professeur adjoint à la faculté de droit d’Osgoode Hall, dans le programme intensif de technologie IP.
Sur le plan personnel, je trouve énergisant de trouver un sujet qui me passionne, d’en parler et de le partager avec un auditoire attentif. Sur le plan professionnel, enseigner m’encourage à rester au fait des développements juridiques récents et m’apprend à simplifier efficacement et à mieux transmettre les questions juridiques complexes. Je crois qu’enseigner a fait de moi un meilleur avocat en m’aidant à mieux communiquer avec mes clients et à mieux les conseiller.
- Dan Ciraco, directeur du droit commercial, Canadian Broadcasting Corporation
J’ai commencé à enseigner après de nombreuses années à diriger un cabinet juridique avec succès. Un jour, j’ai vu un poste d’instructeur parajuriste affiché par un collège local. Des années plus tard j’ai eu la chance d’obtenir un poste à temps plein au Mohawk College. C’est une expérience tellement gratifiante de rencontrer les nouveaux visages en première année, puis de voir qu’à la fin de leur dernière session, ils sont plus enthousiastes encore. En plus du plaisir de les voir acquérir de la maturité de trimestre en trimestre, je ne peux m’empêcher de ressentir une certaine fierté quand j’entends les noms des étudiants et que je les vois traverser la scène lors de la remise des diplômes. Enseigner, c’est essentiellement montrer aux étudiants à aimer le droit. À le comprendre, à l’utiliser. À ne pas avoir peur du changement, mais à plutôt se servir de leurs aptitudes pour changer les choses.
- Cherie Daniel, Mohawk College
Certains parlent de la vocation de l’enseignement. J’ai dû faire preuve de beaucoup d’initiative pour trouver des occasions d’enseigner – des postes affichés en ligne et des annonces dans les Ontario Reports m’ont mis sur de bonnes pistes. Détenir une LL.M. a aidé, aussi. Je commence ma quinzième année d’enseignement et j’aime cela autant qu’avant. Les étudiants dégagent une énergie qui est difficile à décrire, mais facile à ressentir. Et ils continuent à ajouter leurs perspectives neuves à de vieux principes juridiques poussiéreux.
C’est fantastique d’être témoin de la transition des « étudiants » aux « collègues ». Presque chaque jour, je croise un ancien étudiant dans un palais de justice de la province, et il ou elle veut me parler de sa carrière en plein essor. La plupart de ces rencontres finissent par l’évocation de souvenirs du cours qu’ils ont suivi avec moi. Nous avons tous des souvenirs de nos années à la faculté de droit – et avoir la chance de créer ce genre de souvenirs sur une base continue procure un sentiment unique.
- Enzo Rondinelli, juge à la Cour de justice de l’Ontario
Comme procureur de la Couronne, j’ai axé ma carrière sur les questions qui relèvent du droit des jeunes contrevenants. Quand j’étais étudiant en droit, aucun cours n’était offert dans ce domaine. Je voulais concevoir un cours qui refléterait ma passion pour la justice touchant les jeunes. Quand j’ai soumis ma proposition à l’Université de Toronto, la réaction a été très positive. J’ai donc commencé à enseigner le « droit criminel relatif aux jeunes » en 2012.
J’aime beaucoup rencontrer de nouveaux étudiants chaque année et développer des cours spécifiques et enthousiasmants touchant le droit criminel.
- Brock Jones, Ministry of the Attorney General
J’ai beaucoup appris à la faculté de droit et lors de mes premières années de pratique. J’étais heureuse de partager ce que j’avais appris avec ceux qui venaient après moi. Je voulais leur faciliter la tâche et les propulser plus loin en avant : il ne sert à rien de réinventer la roue. Quand j’ai entendu dire que l’Université d’Ottawa cherchait des avocats pour enseigner dans son programme de plaidoirie en première instance, j’ai soumis ma candidature. J’ai enseigné au secondaire avant d’étudier en droit. Je croyais donc pouvoir apporter une base pédagogique solide pour disséminer les aspects théoriques et pratiques d’une bonne plaidoirie.
C’était il y a sept ans et je n’ai jamais cessé d’enseigner depuis. J’ai enseigné différentes versions des cours de plaidoiries, j’ai été entraîneuse pour l’équipe du concours Wilson, puis j’ai travaillé à développer des programmes et enseigné au sein d’une organisation privée.
Ce qui m’a surprise, c’est qu’enseigner a fait de moi une meilleure avocate. L’analyse critique de mes raisons d’agir et des raisons de ma réussite a fait de moi une plaideuse plus consciente. Parce que j’enseigne, je suis une avocate plus efficace et plus réfléchie.
Les plaideurs parlent de l’adrénaline du tribunal, dont ils ne pourraient se passer. Les enseignants ont, eux, la joie du moment révélateur, quand une conclusion ou la solution à un problème devient manifeste. C’est extraordinaire de voir son enseignement devenir la croissance d’une autre personne. On peut presque voir l’ampoule proverbiale s’allumer !
J’adore enseigner, mais j’adore surtout enseigner aux étudiants en droit et aux avocats. Ce sont des gens brillants, qui veulent apprendre. Ils sont déterminés à bien utiliser leur temps. Ils veulent faire ce qu’il faut pour maîtriser une compétence ou un concept. Ces qualités se transforment en défi pour qui veut leur enseigner : ils forment un auditoire exigeant, qui ne pardonnera pas un manque de préparation. Cela dit, ils se connaissent souvent bien, sont reconnaissants et vous remercient pour vos efforts. L’enseignement est gratifiant d’une façon différente de l’exercice du droit.
- Juliet Knapton, Uniersity of Ottawa Faculty of Law, Common Law Section
J’ai commencé à enseigner à temps partiel au collège George Brown en 2009. C’est un collègue du conseil de l’ABO qui m’a encouragé à soumettre ma candidature. Je suis ensuite allée enseigner à l’Université Ryerson.
Enseigner est gratifiant pour plusieurs raisons. D’abord, cela me remémore pourquoi j’ai choisi le droit : je peux partager à quel point il est important que tous comprennent les lois dans leurs vies de tous les jours. Ensuite, les étudiants me forcent à penser à ce que signifie le droit de façon plus vaste. Enfin, enseigner me permet de trouver des façons créatives et amusantes d’appliquer les lois à des situations de tous les jours.
- Esi Codjoe, Human Rights Tribunal of Ontario